France 1, Espagne 0: Je ramène ma fraise

Gariguette, ciflorette, mara des bois... les fraises annoncent l’été. Il suffit, sans les laver, de cueillir dans le jardin ces merveilleux fruits rouges, aux dimensions idéales, d’enlever la queue et de croquer en se laissant envahir par leurs arômes riches et complexes. Fraise sur le gâteau, ils sont riches en vitamine C et oligo-éléments, et peu caloriques.
Si vous n’avez pas de fraises dans votre jardin, précipitez-vous chez votre commerçant préféré, mais de grâce, évitez d’acheter ces gros trucs rouges et insipides cueillis avant d’être mûrs et importés d’Espagne. Plus de 80 000 tonnes de fraises d’Espagne sont envoyées en France chaque année, achetées à bas prix par les grandes surfaces. Avec 10 tonnes par camion parcourant chacun 1 500 kilomètres, ça nous fait 8 000 allers et retours, CO2 et gaz d’échappement compris. Elles sont pro- duites sur 6 000 hectares, dans le sud de l’Andalousie, en empiétant en toute illégalité (grâce à la tolérance du gouvernement) sur le parc national de Doñana, une zone humide inscrite au Patrimoine mondial de l’Unesco, qui abrite l’ultime population espagnole d’une vingtaine de lynx pardelles, dits lynx d’Espagne.
Les fraisiers destinés à cette production sont détruits chaque année. À l’automne, la terre sableuse drainante est stérilisée et la micro- faune détruite avec du poison (bromure de méthyl et chloropicrine). Ensuite, la majorité des producteurs emploient des saisonniers originaires du Maghreb, sous-payés et logés dans des conditions précaires. Pour terminer, les fraisiers poussent sur 5 000 tonnes de plastique noir qui sont soit emportées par le vent, soit enfouies n’importe où, soit brûlées sur place. Ils sont matraqués d’engrais, de pesticides et de fongicides. Ils consomment une grande quantité d’eau issue de forages plus ou moins légaux, appauvrissant la nappe phréatique et fragilisant les zones humides.
Alors, achetons des fraises fraîches cueillies avec soin chaque matin près de chez nous. Le retour des beaux jours est l’occasion de se balader et de découvrir nos petits producteurs de fraises pleine terre. Verlinghem, Phalempin, Lecelles, Béthune, Landrethun-les-Ardres ou Samer fêtent la fraise de qualité. La fraise du Nord-Pas-de-Calais est un peu plus chère, fragile, de saison... mais elle est gustativement tellement meilleure !

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