Légumes oubliés Le come-back du rutabaga

Tous les légumes au clair de lune étaient train de s’amuser – ser Et les passants les regardaient – daient » Cette comptine, nous la chantions naguère.
Mais aujourd’hui, certains de ces légumes ne dansent plus. Le salsifis imposé dans les canti- nes ? Bonnet d’âne. Le topinambour, appelé aussi artichaut de Jérusalem ou poire de terre, le rutabaga, dénommé aussi chou- navet du Siam, deux légumes dont le (mauvais) souvenir reste lié à la guerre 39-45 ? Fusillés. Le panais, sorte de grosse carotte blanche, fort apprécié au Moyen Âge, mais qui provoque des allergies spectaculaires à l’état sauvage ? Aux oubliettes. Qu’est devenu l’institut de Beauvais, une varié- té ancienne de pommes de terre rose, bosselée à chair blanche, qui permettait de réaliser la meilleure purée du monde, pleine de saveurs et de caractère, bien que si difficile à éplucher ? En quarantaine. Le crosne, délicieux tubercule, le radis noir, légumes du début de l’hiver ? Au pla- card. Le pourpier, la mauvaise herbe du jardi- nier de pacotille ? Arraché.
La tendance de l’industrie alimentaire à uniformiser les goûts, les formes et les cou- leurs – et ce, pour toujours plus de profit – a achevé le travail...
Topinambour revival
Depuis cinq à six ans, ces anciens légumes reviennent sur le devant de la scène, encou- ragés par le retour au jardinage, la prise de conscience écologique et la recherche de nos racines. Fort heureusement, la création de nombreux conservatoires pour la préserva- tion de la diversité du monde végétal, et la démarche de certains passionnés assemblés en association (type loi de 1901) ont sauvé ces espèces en voie de disparition.
Les cuisiniers d’élite motivés par le besoin constant de proposer de nouvelles saveurs sont à leur tour entrés dans la danse. Gonzague Coussement, chef du restaurant Le Turbotin à Douai, propose à sa carte un soufflé de topi- nambour sans cuisson. Christophe Hagnerelle, du Val d’Auge à Bondues, revisite le pot-au-feu où le panais remplace la carotte, et le rutabaga, le navet. Christophe Scherpereel, dans son auberge flamande d’Auprès de mon arbre à Terdeghem, sert une salade tiède de ces légu- mes oubliés. La diversité participe à la beauté du monde, oublions d’oublier.

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